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jeudi 16 août 2012

Y : Génération discriminée ?

Vous avez tous au moins ressenti ça une fois dans votre vie. Le coeur serré, la boule au ventre et à la gorge, les larmes aux yeux. La frustration, le sentiment de profonde injustice et d'impuissance face au rouleau-compresseur qu'est devenue notre société insensible et égocentrique actuelle.



Les médias adorent en parler, louer leurs qualités, leurs prédispositions quasi-naturelles pour les nouvelles technologies, leur aptitudes à être présents sur tous les fronts ainsi que leur sens du franc-parler : la génération Y. En résumé : les jeunes actifs. 
Enfin quand je dis actif, soyons lucides. Sur la somme totale des 20-30 ans diplômés, combien sont-ils a être salariés sur le long terme. 
Et là encore, la longévité a aujourd'hui pris une nouvelle définition : là où nos parents s'engageaient jadis dans une carrière toute tracée sur la durée de leur vie, la nouvelle génération que nous incarnons ne peut plus se faire d'illusions. La stabilité porte un nom : le CDD. 

Mais le tout est de parvenir à ce fameux contrat précaire mais si rare qu'il se compare au Saint Graal que tous les nouveaux diplômés désirent de toutes leurs forces. 
On ne rabâchera pas l'éternelle loi du chômage des jeunes en augmentation constante depuis bien des années. Tout le monde le sait (et sinon, quittez tout de suite cet article et ouvrez un journal pour une fois, atterrissez, vous, personne du troisième âge qui avez fait votre vie et, oui on sait, "de votre temps...tout était plus rose"), tout le monde le sait, disais-je, les recruteurs sadiques et radins au possible, souhaitant faire du profit au détriment de la qualité de vie et de la santé mentale de leur personnel, redoublent d'ingéniosité en ce qui concerne les arguments à opposer en vue de refuser une candidature. 

Exemple tout à fait pris au hasard, qui m'est arrivé il n'y a pas si longtemps (ce matin même). Je reçois, après une semaine d'attente interminable, la réponse à mon entretien d'embauche qui, à mon humble avis, avait l'air de s'être pourtant bien déroulé. Un refus. Encore. Et une croix de plus sur la liste de mes échecs. 
Toutefois, analysons l'argument avancé par le recruteur : mon âge.
Trop vieille ? Mince, je n'avais pas vu les années passer... 
Que nenni :  TROP JEUNE !

"Bien que votre profil présente de très grandes qualités et un dynamisme très appréciable, nous avons souhaité privilégier pour ce poste un profil plus âgé que le vôtre."

Un défaut d'expérience dans mon C.V. ? 
Récapitulons donc pour vérifier : 7 années d'études supérieures. Deux diplômes d'une prestigieuse école dans mon domaine. Ajoutez à cela un second master dans une université reconnue. 
De multiples stages dans des établissements mondialement réputés, en collaboration directe avec les directeurs des sections de ceux-ci, et une forte expérience du travail à l'étranger. 
Voyons du côté des langues alors : Trilingue français-anglais-arabe, plus une ou deux autres langues pratiquées occasionnellement, sans compter le Latin et le Grec...

C'est donc bien cela. Ma plus grande erreur ? Mon âge : 26 ans. 
Pour certains, le cap des 25 ans, c'est une fin en soit. On n'est officiellement plus considéré comme un "jeune adulte", toutes les réductions que daignait nous accorder la société nous sont supprimées. On se sent alors comme un coup de vieux s’abattre sur nos épaules. "Ca y est, mes camarades de lycée commencent à se marier les uns après les autres". Mes études achevées (presque 20 ans dans le système scolaire, ce n'est pas rien, depuis le CP). Je suis jetée dans la fosse aux lions, mon (ou "mes", c'est toujours mieux) diplôme(s) en mains. Objectif emploi. A l'aise, Blaise, si j'ai survécu aux concours d'entré aux grandes écoles, passé le cap infranchissable de leurs diplômes, mes pairs me reconnaîtront comme l'un des leurs... 
Ce que l'on n'avait pas prévu, c'est le fait que ces mêmes aînés se sentent soudain menacés par une nouvelle vague fortement diplômée, parfois bien plus au fait des innovations dans leur domaine, les rendant dans bien des cas "sous-qualifiés" alors que la loi hiérarchique joue dans le sens contraire. Ils nous voient comme une menace, alors que nous ne pensons pas à mal. Nous ne prétendons pas à devenir directeur à la place du directeur. Donnez-nous juste notre chance. Laissez-nous la possibilité de gravir les échelons au fil des années et nous arriverons, si notre potentiel s'y prête, à des postes plus élevés dans quelques années, lorsque nous seront réellement "plus âgés" ! 
C'est bien là le problème. Car les employeurs voient l'ascension professionnelle s'effectuer bien plus vite que prévu. Autant éliminer la concurrence à la racine. En empêchant la mauvaise graine de germer dans l'entreprise, on s'évite d'avance de devoir y faire face dans un avenir plus ou moins proche.



La discrimination en fonction de l'âge, je pensais (à tord) jusqu'à ce jour qu'elle n'était réservée qu'aux cinquantenaires licenciés prématurément par leur employeur de toujours (parce-que finalement, la carrière d'une vie, ce n'est peut-être plus tout à fait ça, même pour papa et maman) et qui peinent à se replacer sur la voie de l'emploi, en concurrence avec des "jeunes diplômés" plus attractifs vis à vis des entreprises du même secteur. 
A cette génération précédente, j'aimerais dédier cet article : "Nous autres, jeunes diplômés, ne vous voleront pas vos emplois. Nous sommes tout autant victimes que vous de cette société égoïste, individualiste, avide de profits, dirigée par des hauts cadres vissés sur leurs sièges et leurs privilèges, et prêts à tout pour y rester en ne concédant aucun centime à quiconque viendra quémander un poste." 
Du moment que la machine tourne, on continue comme ça. 

Jusqu'au jour où la machine déraillera. Où les cadres confortablement engoncés dans leurs privilèges glisseront de leurs sièges. 
J'aurais un dernier mot, mesdames et messieurs les employeurs : 
N'oubliez donc pas que vous aussi, en votre temps, vous vous êtes battus pour que la jeunesse ait pleinement sa place dans la société. C'était en mai 68. Aujourd'hui, qu'êtes-vous devenus, mis à part la parfaite réplique de ces vieux bourgeois se gavant comme leurs aînés avant eux, de la misère des autres ?
N'oubliez pas que nous sommes là, génération Y, et vos enfants nous talonnant de justesse... Dans les starting-blocks, prêts à prendre vos places. Là n'étaient pas notre intention première. Nous souhaitions juste un emploi digne, à la mesure de nos compétence et de nos sacrifices, de toutes ces années passées à accumuler du savoir et de l'expérience que vous recherchez tant. Aujourd'hui, nous réclamons vengeance, face à tant d'inhumanité. 
N'oubliez pas, mesdames et messieurs les employeurs, que le temps de votre départ venu... La retraite que vous réclamerez... elle ne sera peut-être plus aussi sonnante et trébuchante que vous pouviez l'espérer. Petit calcul : vous cotisez actuellement pour vos aînés, mais si personne ne vous succède, qui payera pour vous ? Juste retour des chose, me direz-vous !

Génération Y : 
Génération Sacrifiée. 
Génération Discriminée.
Génération Désabusée.


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